[Quête] Un Transport pour Féérune - Partie 2

Les derniers membres d'équipage du navire elfique montèrent à bord, chargés de provisions pour la semaine à venir. Alistair et Zarakaï eux n'avaient pas bougé d'un pouce ; ils étaient restés sur le pont sans savoir ce qui les attendait. Lorsque Arfandel aperçut Raistlin et Evart qui revenaient de leur promenade, il les aida à monter à bord de son navire en leur disant qu'ils allaient partir maintenant. Il leur expliqua que le voyage allait dure encore 5 heures avant d'atteindre Zi'Hafa. Le magicien s'en alla reprendre sa place au pont inférieur tandis qu'Evart restait aux côtés du capitaine.

Raistlin était satisfait de l'état des lieux ; la lumière pénétrait faiblement et était tout de même suffisante pour y voir clair. Les caisses, tonneaux et autres contenants de marchandises étaient bien rangés, certains pouvant en effet servir à ériger une table. Lorsque le magicien s'installa confortablement, un marin entra dans la pièce en examinant le matériel qu'il avait sorti pour travailler: à savoir plume, encrier, parchemin et grimoire de sorts.

- Ah, vous êtes là ! Je vais dire au capitaine que vous étudiez. Vous ne serez pas dérangé comme ça ! dit-il en sortant aussi précipitemment, fermant une porte en bois derrière lui.

Plusieurs heures de route étaient nécessaires pour rejoindre Zi'Hafa et Raistlin profiterait de ce temps pour commencer à rédiger un parchemin de sortilège. Il lui fallut acquérir une énorme concentration puis il se mit au travail, n'entendant aucun autre bruit que la plume gratant le parchemin et le navire qui tanguait.

Le marin qui était venu voir Raistlin s'approcha du capitaine pour lui dire que le magicien travaillait et ne souhaitait pas être dérangé. Il repartit aussitôt à son poste pour faire avancer le navire, en déployant les étranges voiles bleues. Arfandel congédia l'homme qui tenait la barre et s'en empara. Il s'apprêtait ensuite à raconter à Evart ce qu'il savait sur l'avant-poste.

- Je ne suis pas doué pour raconter notre histoire mais il m'arrive souvent de lire des livres que j'emprunte régulièrement à la bibliothèque de Tal'Tressir, quand je m'ennuie. Il resta silencieux un instant pour se remémorer ce qu'il savait. Cet avant-poste a été construit quelques années après la fondation de Zi'Hafa. Le village avait énormément besoin d'être soutenu dans son développement par la capitale mais la jungle était, et demeure aujourd'hui encore l'endroit le plus dangereux de l'archipel. Il était quasiment impossible d'acheminer des marchandises entre les deux communautés si ce n'était pas voie maritime. Le trajet en bateau, comme vous vous en rendrez compte, dure moins d'une journée mais bâtir un avant-poste était une bonne solution pour surveiller le passage et ravitailler les navires en difficulté. Autrefois, je faisais le chemin jusqu'à Zi'Hafa en une seule fois mais, depuis quelques temps, je m'arrête toujours à l'avant-poste ; c'est plutôt agréable je dois dire.

Il finissait son récit tandis qu'il maniait la barre pour garder le cap sur sa destination. Sur la côte, on ne voyait qu'une jungle qui s'assombrissait de plus en plus comme le soleil déclinait dans le ciel. Celui-ci changea rapidement de couleur, il devint plus orangé mais la luminosité demeurait même en l'absence du soleil. Contrairement aux habitants de Tal'Tressir, ceux de Zi'Hafa ne pourraient jamais observer un coucher de soleil en raison de leur emplacement géographique. Le voyage touchait à sa fin après plusieurs heures de navigation dans le calme le plus total.

- Messire Evart, dans quelques instants vous pourrez admirer les premières tours d'observation de Zi'Hafa ! Dommage que l'on ait pas croisé de gros poissons, ça aurait été vraiment magnifique, enfin bref...

Le capitaine confia la barre à son second et laissa Evart quelques instants pour aller donner ses ordres. L'équipage s'activa enfin après plusieurs heures de relâche et l'équipement qui permetterait de s'amarrer aux quais de la cité allait être mis en place. La baie qui bordait Zi'Hafa était relativement bien entretenue: il n'y avait aucune construction et les palmiers pouvaient pousser où bon leur semblaient. Les navires rattachés au port flottait tranquillement sur des eaux peu profondes et calmes. Le vaisseau à voiles bleues d'Arfandel s'avança au milieu des autres et la cité humaine était visible à présent. On remarquait tout de suite la différence de style avec Tal'Tressir: les remparts étaient faits de pierre grise qui servaient uniquement à la défense de la cité. L'architecture des bâtiments était bien connue des natifs de Faerûn, aucun doute que tout avait été construit par des humains. Ce qui frappait les étrangers dans le paysage c'était principalement l'immense volcan qui surplombait la ville à quelques lieues au nord. Aucune fumée ne s'en dégageait mais cela n'empêchait pas d'insuffler la crainte d'une éruption dans l'esprit des habitants de la cité.

- Je dois l'avouer, j'ai une peur bleue de cette montagne ! On dit que d'étranges créatures y vivent mais comme on a jamais eu de problèmes, personne n'a été vérifié et c'est pas moi qui sera le premier à le faire. Nous allons bien pouvoir descendre !

Le navire continua sa route au milieu des autres jusqu'à un quai bien entretenu où plusieurs personnes semblaient immobiles, sans doute attendaient-elles du travail. Lorsque le navire fut amarré, plusieurs dockers arrivèrent pour décharger les marchandises tandis que d'autres gens étaient simplement venus prendre des nouvelles des marins. Arfandel salua l'une de ses connaissances depuis le pont puis souria à Evart et à Raistlin qui venait de rejoindre les autres.

- Et bien, ce fut un plaisir de voyage avec vous messieurs !~

Au terme de longues heures d’une retranscription appliquée, Raistlin entendit de l’agitation sur le pont du bateau. Cela faisait longtemps qu’il s’affairait, aussi décida t-il de stopper son ouvrage, pour mieux le reprendre plus tard. Le jeune mage rassembla ses ustensiles dans son sac, avant de remettre délicatement le parchemin dans son étui. Ensuite il remonta sur le pont supérieur du bateau. Ce dernier était désormais amarré au port de Zi’Hafa et, même si le soleil déclinait, Raistlin pu voir que le style architectural de la ville ne lui était pas inconnu. Plus loin, le jeune homme vit Evart et décida de le rejoindre. Arfandel revint vers les aventuriers et les salua. Le magicien fit de même et le remercia, afin ne pas paraître trop antipathique. Ensuite Raistlin dit au noble :

- Bien, nous voilà arrivés. Je pense que nous devrions nous diriger vers l’auberge principale, afin de réserver des chambres. Une fois ceci fait, nous pourrions peut être aller voir si la bibliothèque est encore ouverte, et ainsi nous informer sur le clan de notre ami l’homme lézard. Qu’en dites-vous ?

Le jeune homme attendit une réponse de son compagnon.

Raistlin entra dans sa chambre sans mot dire. Elle était petite, mais possédait tout le confort nécessaire pour une nuit. L’absence de fenêtres était compensé par un éclairage suffisant, dispensé par les quelques bougies de la pièce. Le jeune mage déposa son sac sur le coffre et sortit son matériel, afin de continuer sa transcription. Alors il se souvint qu’il était censé rejoindre le jeune noble à la bibliothèque. Cependant, aux vues de l’heure tardive, le mage décida qu’il n’en ferait rien. La bibliothèque allait certainement fermer, et Raistlin n’avait pas envie de s’y rendre pour rien. Une fois son espace de travail agencé comme il le souhaitait, le jeune homme se restaura quelque peu. Il prit une petite portion de ses rations et l’avala sans grand appétit. Après ce fugace repas, il s’installa confortablement et repris la transcription de son sort… Ce n’était qu’au terme de plusieurs heures d’un travail acharné que le jeune homme s’arrêta. Ereinté, il ne désirait qu’une seule chose, dormir. A l’aube le jeune mage se réveilla en sursaut, tiraillé par une intense douleur à la poitrine. Cette douleur, le fardeau légué par son ancien maître, lui remémora cet affrontement à la suite duquel sa vie avait changé. Cependant Raistlin décida de ne pas s’appesantir sur le passé. Après s’être préparé il se dirigea vers le rez-de chaussée. Ainsi il repéra Evart, assis à une table, devant ce qui semblait être le petit-déjeuner. La douleur le tourmentait toujours, et d’une démarche lente, appuyé sur son bâton, le jeune mage rejoignit son compagnon. Raistlin le salua et prit place en face de lui, laissant le soin au jeune noble de démarrer la conversation s’il le désirait.

Les deux compagnons remercièrent le savant, et prirent chacun un ouvrage. Une fois leur lecture terminée, ils mirent en commun leurs découvertes. Ainsi existait-il un village d’homme-lézards dans une grotte, et comme ils avaient pu le voir lorsqu’ils en avaient combattu un, ces créatures étaient décrites comme étant plutôt dangereuses. Raistlin et Evart n'auraient aucunes chances si ils attaquaient ce village sans préparation, ni reconnaissance préalable. Aussi d’un commun accord, les deux aventuriers décidèrent donc de s’informer plus amplement sur la question. Cependant le journal d’expédition qui mentionnait la grotte était vieux de 100 ans, si l’on se référait à sa date de rédaction. Les deux compagnons ne Glarthir Galot, en personne. Cependant il restait possible que ce dernier ai une quelconque descendance. Dès lors les deux hommes dérangèrent à nouveau le savant. Ayant remarqué, plus tôt, la réaction du savant quand Evart s’était adressé à lui en Elfique, Raistlin dit doucement en commun :


- [Commun] Acceptez nos excuses pour abuser ainsi de votre temps, cependant nous cherchons de plus amples information sur ces créatures, les hommes-lézards. Sauriez-vous si l’aventurier, Glarthir Galot, avait une quelconque descendance, ici à Zi’Hafa ?


Le mage et son compagnon attendirent calmement la réponse de l’érudit.

Devant tant d'intérêt vis à vis des Hommes-lézards, le savant ne pouvait que consentir à fournir davantage d'informations aux aventuriers. Il se doutait qu'ils espéreraient régler le problème des reptiles, si tant est qu'il y en ait un. Cependant, il craignait que ces étrangers n'aillent trop loin dans leur éventuelle entreprise.

- Malheureusement, je ne peux vous fournir plus de détails sur les Hommes-lézards. Moi-même je n'en ai croisé qu'une seule fois et j'étais plutôt occupé à tenter de sauver ma vie qu'à les étudier. Tout ce que nous savons sur ces créatures est contenu dans ces deux ouvrages. Il fit silence et fixa le plafond pour réfléchir lorsque Raistlin lui parla d'une descendance de Glarthir l'explorateur. Oui, absolument ! Glarthir a eu une fille qui vit encore actuellement. Oh, elle doit bientôt approcher les quatre-vingt-dix ans mais elle est plutôt en forme je dirai. Elle réside dans le village, à l'extérieur des murailles. Avant que vous ne partiez laissez-moi retrouver son nom... Il leva l'index vers le haut en signe de succès. Miranda ; oui c'est bien cela, Miranda Galot.

Ainsi l'explorateur avait une descendance. Les deux aventuriers allaient peut être avoir de plus amples renseignements auprès de cette dame, et ce malgré son âge vénérable. Alors qu'ils sortaient de la bibliothèque, le jeune noble demanda son avis à Raistlin quand à la suite des événements. Le mage répondit qu'il lui semblait plus approprié de se rendre chez la descandante de l'explorateur, et ils se remirent silencieusement  en route. Raistlin étant d'un naturel peu bavard, cela lui convenait parfaitement. Le trajet ne dura pas longtemps et arrivé devant la maison, Le mage s'avança vers la porte, la frappa du point et attendit qu'on vienne leur ouvir, ou que quelqu'un leur signifie d'entrer. Pendant ce laps de temps, il s'interrogea sur le déroulement de cette imminente rencontre. Miranda Galot avait été décrite par le bibliothécaire comme "plutôt en forme". Raistlin espéra tout de même qu'ils ne tomberaient pas sur une veillarde sénile et affabulatrice. Démêler la réalité de la fiction n'en serait que plus difficile encore.

Les aventuriers avaient maintenant la possibilité de parcourir la ville pour admirer le nouveau type d'architecture, beaucoup moins élaboré qu'à Tal'Tressir car, plus humain d'une certaine manière. Les rayons du Soleil reflétaient sur les fenêtres des petites maisons individuelles de la cité. Le ciel n'était pas encombré de nuages et la luminosité n'en fut que plus grande. Contrairement aux habitants de Tal'Tressir, ceux de Zi'hafa pouvaient admirer le lever du Soleil par-delà l'horizon. Raistlin et Evart marchaient d'un pas léger et ne rencontraient pas beaucoup de monde dans les rues.

Lorsqu'ils arrivèrent aux portes, qui étaient aussi ouvertes que celles de la cité elfique, ils virent par contre qu'elles étaient gardées par plusieurs soldats lourdement armés. Sans les regarder, les aventuriers continuèrent leur chemin pour arriver dans ce qui était surnommé "le village". En effet, il y avait beaucoup plus d'habitations à l'extérieur qu'à l'intérieur des murailles. Toutes les maisons étaient des chaumières rassemblées autour d'une place qui accueillait le marché chaque jour. Autour du village on pouvait remarquer les immenses champs qui étaient cultivés par les fermiers. Il y avait assez de nourriture pour nourrir plusieurs villes et c'est probablement pourquoi Tal'Tressir n'a pas d'activités agricoles. Les aventuriers continuèrent leur chemin et pénétrèrent maintenant dans le village.

Le marché était aussi actif que celui visité dans l'autre cité mais là il n'y avait quasiment que des humains. Les Elfes étaient nombreux également mais ils occupaient tous des rôles de marchands. Les aventuriers demandèrent leur chemin à un passant qui se montra très poli et courtois envers les étrangers. Il leur indiqua la route à suivre pour aller chez la vieille Miranda. La maison en question était la dernière du village, à la limite avec les terres cultivées. Lorsque les aventuriers approchèrent, ils remarquèrent que celle qu'ils étaient venus voir était assise sur une chaise, devant sa maison, une petite créature pleine de poils dans ses bras. En vérité, il s'agissait d'un chat gris mais un tel animal était rare à voir dans ces régions tropicales. Malgré son âge très avancé et les rides qui en témoignaient, la vieille femme se leva sans problèmes de sa chaise, toujours en portant son animal de compagnie. Elle prit la parole en premier en voyant arriver les étrangers.

- Bonjour, qu'est-ce qu'une vieille femme peut faire pour vous ?
Lorsque les étrangers, après l'avoir saluée en ayant donné leur nom, lui expliquèrent qu'ils souhaitaient des informations sur son père, Glarthir Galot, Miranda baissait les yeux, cherchant le moindre souvenir à son sujet dans son esprit.
- Oh, mon père ne m'a jamais vraiment parlé de son expédition dans la jungle. Il avait préféré garder ses secrets avec lui. Tout ce que je sais, c'est que nous n'avons jamais eu de problèmes avec les créatures qu'il a vues dans cette grotte. Mon père ne s'est jamais remis de la mort de son ami Jarreth et combien de fois il a supplié la milice de l'aider à se venger... Il pensait connaître le point faible de ses ennemis: le feu. Hélas, il n'a jamais pu le vérifier car il est mort sans avoir rencontré d'autres créatures. Enfin... il s'est bien occupée de moi et avec ma mère nous étions heureux. Elle souriait alors qu'elle repensait à son enfance puis, sans prévenir, elle demanda: Vous voulez du thé ?

Le thé que la vieille femme avait servi n'était autre que le litre qu'elle s'était préparé pour tenir jusqu'au soir. Il était donc déjà à bonne température. Miranda n'avait pas l'habitude de recevoir des gens ; d'ordinaire c'était elle qui se déplaçait pour rencontrer ses voisins, chose assez curieuse pour une femme de son âge. Quoiqu'il en soit, elle paraîssait contente, même si les aventuriers lui avait parlé de son défunt père. Apparemment, les gens d'ici acceptaient facilement les morts naturelles.

Après cinq bonnes minutes de discussion sur les Hommes-lézards, ce qui n'était pas très joyeux, Evart entama un autre sujet: les chats. Celui que Miranda avait dans ses bras quand les aventuriers sont arrivés s'était montré un peu craintif à la vue d'étrangers. Mais dès l'instant où le Cormyrien y prêta un peu attention, l'animal se mit à ronronner et il monta sur la petite table en bois où étaient disposées les tasses de thé. Miranda le reprit immédiatement dans ses bras et répondit aux questions de Evart pendant que l'animal continuait de ronronner.

- Ce chat s'appelle Parda, et il est le seul qui vit sur l'archipel ! Mon père me l'avait ramené d'un de ces voyages, le plus long en fait. Celui qui l'avait mené jusqu'à la terre que les étrangers nomment Faerûn. Si ce pays est aussi vaste qu'il me le racontait, alors il doit y avoir des milliers de créatures aussi jolies que mon Parda ! J'aurais tellement aimé pouvoir y aller mais c'est un voyage beaucoup trop dangereux. Rares sont ceux qui tiennent en mer aussi longtemps mais les courageux finissent toujours par être récompensés. Elle souria à nouveau, puis le chat quitta les bras de Miranda pour aller s'allonger par terre du fait que la chaleur. Elle continua ensuite à parler.
- Sinon, parlez-moi un peu vous ! D'où venez-vous et pourquoi vous intéressez-vous aux voyages de mon père ? Vous n'êtes pas venus ici pour admirer mon petit chat ! dit-elle en se demandant quel âge il pouvait bien avoir aujourd'hui... il paraissait toujours être en très bonne forme.