[Quête] Un Transport pour Féérune - Partie 2

Messages : 846

Le magistrat semblait satisfait de la réponse d'Evart. Plus encore, il était satisfait d'avoir affaire à un homme issu d'une famille noble, aussi étrangère qu'elle puisse être. Glaemar ne connaissait pas grand chose du monde extérieur et cela l'intriguait de savoir combien de nobles familles régnaient sur le monde, à Faerûn. Le fait que le cormyrien prononça le nom de Shedin n'influença pas le procès, bien que Glaemar, et toutes les personnalités importantes de la cité le connaissaient. L'alchimiste esquissa un sourire qu'il était impossible pour Evart de discerner en raison de sa position. Le combat avec l'araignée intéressa davantage le magistrat, comme l'avait suggéré Evart. Comme il avait toujours la parole, il se permit d'insister sur ce fait :
- Pouvez-vous nous raconter ce combat avec l'araignée avec plus de détails ? Mais avant tout, j'aimerais savoir comment Brock a-t-il pu se retrouver dans une telle situation !

Alors Evart commença son récit : - Lorsqu'il était chez les Hommes-Lézards, Brock a servi à des taches domestiques puis sa situation s'est dégradé pour devenir nettoyeur de cadavre puis il fut chargé de nourrir les araignées. Je laisse deviner à tous combien cette tâche peut s'avérer cruelle et dangereuse. C'est donc à la proie à cette affreuse créature que mon compagnon et moi-même l'avons trouvé.
Quand à nous, nous avons exploré une grotte où nous avons trouvé un camp peuplés de pirates et d'hommes-lézards. Nous avons vu un petit promontoire qui nous permettrait certainement d'avoir une meilleure vision du camp, nous sommes donc montés et nous avons trouvé une petite caverne que nous avons exploré, nous sommes tombés sur cette araignée qui allait dévorer Brock.

Nous avons donc combattu l'araignée grâce à un peu de poix, la magie de mon compagnon et mon épée. Au bout d'un moment, elle a mystérieusement disparu. Nous avons donc aidé Brock, je suis retourné épier le camp mais l'araignée est réapparue et a planté son dard dans mon compagnon mage. J'ai immédiatement rejoint la grotte où nous avons à nouveau combattu l'araignée qui a été tuée. Après un peu de repos, j'ai confectionné un cataplasme pour aider Brock à traverser la forêt et j'ai également soigné mon compagnon grâce aux pouvoirs conférés par Tyr, le Dieu Juste. A la suite de cela, nous avons voyagé jusqu'à Zi'Hafa pour que Brock puisse revoir sa famille et soit présenté devant vous.

Concernant le magistrant, certains points du récit n'avaient pas eu besoin d'être mentionnés mais il avait demandé à Evart de tout raconter dans le détails et pour finir Glaemar trouvait cela très inquiétant. Il avait déjà entendu des histoires au sujet de monstres qui se tapissaient dans les recoins sombres de l'archipel, mais jamais il n'aurait pensé trouver des araignées aussi énormes. Il poursuivit :
- J'aurais une dernière chose à dire avant de laisser la parole à mes collègues. Vous dîtes avoir trouvé un campement dans les souterrains rassemblant à la fois Hommes-lézards et pirates ? C'est étrange, bien que ces deux groupes agissent de la même manière, nous ne les avons jamais rencontrés en même temps... il fut soudainement interrompu par Branwen.
- Si je puis me permettre, cela est arrivé une fois. Rappelez-vous l'histoire de Glarthir Galot ; il avait fait mention d'un campement de lézards et d'hommes travaillant ensemble. Il avait même solicité l'aide de la milice à l'époque.
- Et dire que nous n'avions jamais pris cette information au sérieux, poursuivit Glaemar.
- Nous reviendrons plus tard sur ce sujet, continua Branwen. Pour le moment, parlons de Brock. Pouvez-vous me dire pourquoi il a rejoint le groupe des pirates lorsqu'il n'était encore qu'un jeune homme ?

Evart répondit : - C'est une question embarassante pour lui. Après une violente dispute avec son père, Brock s'est enfui de chez lui et a voulu rejoindre les pirates qui lui paraissaient offrir une nouvelle vie d'aventures, une vie exaltante qui lui permettrait de s'élever socialement. Il ne se rendait pas compte de l'affront qu'il faisait à la société et à l'ordre sacré qu'est la famille.
Mais je suis convaincu qu'il s'est rendu compte de la gravité de ce qu'il fallait et qu'il a un sincère et profond désir de se repentir.

Les magistrats ne doutaient pas de ce désir ; ses prochaines actions lui permettraient sans doute d'avoir un avenir meilleur. Mais on ne pouvait pas baser ses certitudes sur les dires d'un étranger, aussi juste soit-il. C'est pourquoi Branwen se devait d'interroger personnellement Brock. Avant cela, elle sortit un pendentif d'une des manches de sa robe dorée. Le pendentif représentait un petit disque argentée qui commençait à luire lorsque la prêtresse le caressa avec sa main droite. Une faible aura l'entoura et elle posa alors sa question :

- Nous n'avons pas eu vent de cette dispute, mais nous savons que Armand Lest était quelqu'un de sévère. Loyal envers sa femme et ses enfants, et fidèle à son devoir, mais sévère. Il est normal pour un enfant subissant ce genre de chose d'avoir envie de fuir très loin. Notre archipel est tout ce que nous avons, et vouloir partir, c'est vouloir quitter notre civilisation et par conséquent, se rapprocher des groupes extérieurs qui nuisent au bon fonctionnement de la société. Mais dis moi Brock, dit la prêtresse en s'adressant à lui personnellement, maintenant que tu es de retour, et que ton père n'est plus, que comptes-tu faire pour te racheter et aider ta famille ?

Brock prononça un mot avant de s'arrêter, il hésitait et ne savait quoi dire. Il n'avait pas le temps pour réfléchir, la question lui était posée et il lui fallait y répondre avec toute l'honnêteté dont il était capable. Il jeta un coup d’œil dans l'assemblée mais ne parvint pas à distinguer sa mère, tout en sachant pertinemment qu'elle s'y trouvait. Il répondit alors :
- J'essayerai de trouver un travail honnête, je... je resterai auprès de ma mère et de ma soeur et jamais plus je ne quitterai mon foyer. J'ai passé trop d'année dans l'ombre et la misère, je ne demande qu'à vivre sous la lumière du soleil à présent. J'accepterai toutes les sanctions du conseil, mais pitié, ne m'envoyez pas en cellule ! Je vous jure que je n'ai commis aucun crime impardonnable, je n'ai même jamais tué personne... Il commençait un peu à s'emporter mais la prêtresse leva sa main droite pour lui inciter de se taire.

Branwen aurait pu lui poser d'autres questions, concernant les autres crimes qu'il avait pu commettre durant son adolescence mais elle avait obtenu ce qu'elle souhaitait, non pas des mots qu'auraient pu prononcer Brock, mais des sensations qu'elle perçut lorsqu'elle écoutait son coeur. Bien qu'il ne disposât pas d'un courage immense, il n'était pas fou et ce qu'il prévoyait à l'avenir était sincère et tout à fait réalisable. Pour la prêtresse, le verdict était déterminé mais elle n'en laissa rien paraître aux autres. Elle conclut sur le fait qu'elle n'avait plus rien à ajouter. Glaemar reprit ensuite la parole :

- Tes dires me suffisent Brock. A présent je souhaiterais revenir sur le camp des lézards. Il s'adressait maintenant à Evart. Nous allons reconsidérer la menace avec plus d'attention, mais pouvez-vous affirmer qu'ils sont plus dangereux que les petits raids auxquels nous devons faire face de temps en temps ? Une alliance d'hommes et de créatures reptiliennes, c'est certes intriguant mais je doute qu'ils puissent oeuvrer ensemble bien longtemps. Nous avons quelques connaissances au sujet de ces créatures et elles sont tout sauf enclin à la coopération avec des humains. Ils leur serviraient plus en tant que nourriture !

- Si cette alliance parait pérenne, c'est qu'elle est dirigé par un personnage énigmatique du nom de Rhadjiara, il pourrait s'agir d'un Ssri-tel-quessir, mais il est à peu près certain que c'est un puissant mage. Il contrôle également les araignées géantes aux dires de Brock, peut-être est ce grâce à sa magie que celle que nous avons combattu a disparu. Quoiqu'il en soit, il est suffisamment puissant pour que les hommes-lézards acceptent de traiter avec des humains. En outre, il possède un camp relativement conséquent avec près d'une cinquantaine de tentes, des tentes plus grosses avec des réserves et nous n'avons pas pu aller plus loin dans la grotte. De plus, ils avaient déjà un camp, certes plus petit, dans la forêt. Donc cette menace semble être importante et grave.

L’étranger à la peau dorée semblait réfléchir à ce que lui avait dit le tailleur, c’était tout du moins ce que pensait l’intéressé. La réponse fit s’illuminer son visage. L’homme semblait prêt à dépenser son or, et le marchand ne l’en empêcherait pas… Aussi se précipita-t-il à la recherche de ce que lui avait demandé son client : un pourpoint léger, un pantalon, une chemise ainsi qu’une cape à capuche en laine, munie de manches amples.

L’artisan revint quelques instants plus tard les bras chargés de tissus divers ainsi que d’un mètre. Après avoir déposé son fardeau sur une table il dit à son client :

- J’ai là une grande variété de tissus des plus basiques aux plus raffinés et dans une large gamme de couleur !

Voyant que son interlocuteur n’écoutait que d’une oreille distraite ses boniments, l’homme rentra dans le vif du sujet :

- A la vue de vos robes il me semble judicieux de vous conseiller un tissu rouge-grenat voire rouge-sang.

Il attrapa un échantillon de tissu, avant de continuer :

- J’ai justement un tissu brodé d’excellente qualité dans cette teinte. Il conviendrait parfaitement pour votre pourpoint.

L’homme, peu loquace, et hocha simplement la tête en guise d’assentiment et retint finalement un camaïeu de rouges plus ou moins sombres pour le reste de sa tenue. Après avoir pris les mesures de l’étranger, l’artisan raccommoda sa robe et s’absenta afin de donner ses instructions à un de ses assistants.

Raistlin avait observé un mutisme presque complet depuis son entrée dans la boutique, laissant le marchand le conseiller, se contentant d’hocher la tête ou siffler « oui » d’une voix grêle. Cependant lorsque le marchand revint il s’enquit du coût et du délai de préparation de sa commande. Le tailleur lui répondit de sa voix grave :

- Bon ça vous fera 10 pièces d’or pour l’ensemble, le raccommodage de votre robe est offert par la maison ! Pour ce qui est du délai, ne vous inquiétez pas, j’ai confié votre commande à mon meilleur assistant. Elle sera prête d’ici demain en fin de matinée.

Le jeune mage sorti sa bourse, donna ses 10 pièces d’or au marchand avant de sortir sans mot dire. Sous la chaleur écrasante du soleil, Raistlin retourna avec peine vers le manoir où se tenait l’audience. Il devait s’être écoulé moins d’une demi-heure depuis son départ de la bâtisse, le tailleur étant très efficace et son client peu regardant. Ainsi, alors qu’il s’asseyait sur un banc au fond de la salle, Raistlin put tout juste entendre son compagnon déclarer qu’il estimait grave et importante la menace que représentait l’alliance contractée entre les pirates et les hommes-lézards…

Messages : 846

Les portes de la salle d'audience étaient closes durant le procès mais il était possible pour un visiteur, en retard ou agacé, de rentrer et de sortir. Personne ne remarqua l'entrée de Raistlin qui en profita pour se glisser dans le fond et s'assit à une place qu'il eut du mal à trouver. Il arrivait à un moment crucial du procès car c'est là que les décisions allaient être prises au sujet de la menace. Le magistrat Glaemar répondit à Evart :
- Ce que vous dîtes est inquiétant en effet...
Il prit un air pensif et réfléchissait si longtemps qu'un autre magistrat prit la parole ; cette fois il s'agissait de Yeliandre.
- Inquiétant ? C'est une catastrophe ! s'exlama-t-il. - Nous n'avions jamais pensé qu'ils puissent se regrouper et se développer à ce point... Les seuls campements auxquels nous avons eu affaire n'étaient pas bien grands, et nos amis elfes se sont assurés de les avoir tous rasé. La plupart étaient dissimulés sur les îles voisines. Je crains qu'il n'existe un réseau souterrain d'une ampleur qu'il est possible de voyager entre les différentes îles sans être repéré par nos navires de patrouille.

La foule commençait à s'agiter et le bruit s'intensifia à un point que les magistrats durent user de leur autorité pour ramener le silence.
- Calmez-vous je vous en prie ! Cette nouvelle est certes inquiétante mais je vous assure que toutes les mesures seront prises pour ramener la paix dans notre ville. Soyez tranquilles et attendez la fin du procès si l'un de vous souhaite poser des questions.

Lorsque le calme revint, le seul magistrat qui n'avait pas encore pris la parole s'adressa à Evart.
- Je voudrais des détails en ce qui concerne le dénommé Rhadjiara.
Naya, telle qu'elle se faisait appeler, était la dernière des quatres magistrats de Zi'Hafa. Elle n'avait pas un grand rôle comme avait pu expliquer Yeliandre à Evart tout à l'heure car il n'y avait pas de magiciens dans la ville à part elle. Elle paraissait très timide et ne s'était pas exprimée durant tout le procès. Sa voix était faible et ne portait pas très loin, il fut difficile à Evart d'entendre chaque mot qu'elle prononça. Elle ne pouvait rivaliser avec Branwen de ce côté-là. Son visage n'était pas facile à discerner car elle portait en permanence un capuchon bleu, probablement pour avoir l'air plus magicienne. Son principal atout devait résider dans son regard envoûtant qui inciterait n'importe qui à confier ses secrets. Le Cormyrien répondit ce que Brock lui avait dit, à savoir qu'il n'avait jamais vu le visage de ce mystérieux personnage. Les seuls détails qu'il avait remarqués, c'était sa corpulence et sa voix qui confirmait le fait qu'il n'était pas humain. Evart réitéra qu'il s'agissait peut être d'un Ssri-tel-quessir mais Naya protesta :
- J'en doute fort. Et je devine que vous ne savez pas de quoi il s'agit exactement, n'est-ce pas ? dit-elle sur un ton qui laissait présager le mépris typique des magiciens. Je suis désolée, mais nous préférons éviter le sujet, reprit-elle plus poliment. Sachez que ces créatures ont été exterminées durant la grande purge et qu'il serait impossible d'en voir un rôder dans l'archipel, nous le sentirions. De plus, Rhadjiara est un nom plutôt inhabituel. Je penserais qu'il s'agirait d'une créature qui nous vient de très loin. Peut être est-il arrivé de Faerûn sous une forme amicale et qu'il a profité de notre confiance pour se dissimuler par la suite.

La magistrate n'en finissait plus de parler. Elle avait l'habitude de demeurer muette jusqu'à ce qu'on en vienne à des sujets qui l'intéressaient davantage. Glaemar profita d'une petite pause pour reprendre la parole :
- Nous aurons tout le temps d'en apprendre plus sur lui. Pour le moment il faut se concentrer sur le campement qui grossit de jour en jour. Nous ne pouvons pas tolérer leur présence. Je vais demander à l'audience de patienter pendant que mes collègues et moi délibérons au sujet de cette affaire, et de Brock.

C'est ainsi que les magistrats se levèrent un par un et quittèrent la salle d'audience pour se retirer dans la petite antichambre. Pendant leur absence, le public en profitait pour faire davantage de bruits. Pour Evart, ce peuple n'était pas très différent de ceux qu'on pouvait trouver à Faerûn ; les gens vivaient leur vie paisible et s'agitait dès qu'un évènement perturbait leur train de vie quotidien.
Ce moment de répit pouvait être utilisé par le couple accusé-protecteur car ils étaient à ce moment-là autorisés à se parler. Ne sachant trop quoi dire, Brock laissa la parole à Evart qui lui demanda ce qu'il avait pensé de l'audience. Le jeune homme était plutôt confiant, il était persuadé que les informations qu'il fournissait étaient importantes et que les magistrats allaient plutôt concentrer leurs efforts dessus. Evart le quitta quelques instants pour aller dire quelques mots à Raistlin qu'il avait aperçu rejoignant la salle quelques minutes auparavant. Le Cormyrien traversa l'assemblée sans porter attention à Shedin, il avait l'intention de lui parler mais pas avant que le procès ne soit achevé.

Quelques minutes suffirent pour les magistrats qui revinrent à leur place, accompagné du silence de l'assemblée. Evarta avait regagné sa place peu avant leur retour et était prêt à entendre le verdict, comme tout le monde. C'est Yeliandre qui prononça un discours :
- Je demande à tous votre attention ! Nous sommes tous tombés d'accord en ce qui concerne notre affaire. Je vais commencer par le plus important : nous allons tout mettre en oeuvre pour régler la menace des hommes-lézards dès que possible. Un émissaire sera envoyé immédiatement après l'audience pour aller quérir de l'aide auprès de nos amis elfes. Il n'y a aucune raison d'être inquiet, la cité est bien protégée et d'après les dires de nos amis ici présents, nos ennemis se tiennent tranquilles pour le moment. Nous allons tout le temps d'agir, dit-il en regrettant un peu cette dernière phrase.

Le magistrat n'attendit pas de réflexion et bascula à la seconde chose qu'il devait annoncer.
- Brock, tu as sollicité une audience auprès du conseil alors que personne ne t'accusait de quoi que ce soit, dans le seul but d'informer ton peuple d'une grave menace qui plane sur nous depuis longtemps déjà. Etant considéré comme service rendu à la cité, et après l'entente unanime de tous les magistrats, tu es acquitté de toutes les charges retenues contre toi ; à savoir la collaboration avec un groupe hostile. Tu reprendras ta place dans ta famille et serviras les intérêts de la cité comme s'il ne s'était rien passé durant ces dernières décennies.

Je souhaiterais terminer cette audience en remerciant nos invités qui nous viennent de loin et qui ont sauvé notre Brock d'un destin atroce. Au nom de la cité, je vous en remercie. Venez me voir plus tard dans mon bureau, c'est au premier étage.
Yeliandre continua son discours un petit moment encore, en prenant bien soin de ne pas effrayer la population mais dans l'ensemble tout se passa bien. Brock fut soulagé d'un grand poids et remercia une fois de plus Evart pour son aide. Même si aucune question piège ne lui avait été posée, le Cormyrien avait donné une bonne image des étrangers qui viennent quelques fois en visite dans l'archipel et ceci n'était pas pour déplaire au magistrat. Lorsque tout ceci fut terminé, la mère de Brock sortit de l'assemblée et alla enlacer son fils. Elle remercia elle aussi les aventuriers et leur rappela qu'ils étaient toujours invités pour le souper du soir s'ils étaient d'accord. Petit à petit la salle se vida de ses occupants mais le bruit était toujours aussi assourdissant ; le son avait tendance à s'amplifier dans cette salle. Du côté des magistrats, Branwen s'était éclipsée très vite et Yeliandre se dirigeait vers la sortie en compagnie d'un citoyen avait qui il parlait. Quant à Glaemar et Naya, ils restèrent quelques minutes de plus sur leur siège, apparemment les magistrats n'avaient pas terminé leur discussion.

Le dénommé Glaemar, chef de la milice de Zi'Hafa, semblait quelque peu sceptique sur l'alliance entre les pirates et les hommes-lézards, ce qui était logique au vue de la psychologie violente des reptiliens. Il fut interrompu en cela par Branwen qui semblait ouverte à la possibilité mais qui redirigea le débat sur le cas de Brock dont Evart était le Protecteur. Il décrivit rapidement comment le jeune avait rejoint le groupe pirate en tentant d'insister sur sa volonté de se repentir. Alors Branwen reprit la parole en sortant un pendentif légèrement lumineux qui devait, à coup sûr, lui permettre de vérifier la véracité des dires de Brock. Elle sembla satisfaite de ce qu'il répondit, au grand soulagement d'Evart.

Immédiatement après, le guerrier exprima sa conviction et demanda au jeune noble des précisions sur la menace qui se profilait. Ce à quoi, le cormyrien répondit avec le maximum de précision possible. Le magistrat Glaemar répondit avec un sang-froid tout militaire alors que Yeliandre s'exprima en homme d'affaires effrayé, comme s'il pensait aux pertes financières causé par le danger mais il se ressaisit comme s'il craignait que la panique crée plus de pertes que la menace elle-même. En dépit de ce jugement cru, Evart n'avait aucun mépris pour les marchands contrairement aux autres nobles. En effet, chacun avait un rôle important dans la société puisque les marchands faisaient circuler la richesse et la créait tandis que le vrai noble, qui l'était autant de cœur que de société, devait avoir le sang-froid nécessaire à diriger son pays.

Alors que le magistrat-marchand lui avait dit qu'elle intervenait peu, Naya prit la parole et demanda des précisions sur l'énigmatique chef. Evart lui dit tout ce qu'il savait sur lui en supposant qu'il pouvait s'agir d'un Ssri-tel-quessir, ce que Naya refusa catégoriquement. Il y avait un peu de mépris dans sa voix ce qui piqua au vif l'honneur du jeune noble qui n'en laissa rien paraître, habitué au secret et la dissimulation nécessaires à la vie parmi les nobles. Quoiqu'il en soit, il jugea dangereux d'écarter d'un revers de manche cette possibilité, c'était vraiment l'attitude d'un peuple, en tout cas du membre d'un peuple, qui n'avait pas connu trop de guerre.

A la suite de cela, Glaemar reprit la parole et se concentra sur la menace directe représentée par cette alliance malveillante. C'était important selon Evart mais la puissance de Rhadjiara était certainement plus grave encore. Quoiqu'il en soit, la séance fut levée et les magistrats se retirèrent pour délibérer. Le cormyrien rejoint alors Raistlin pour converser quelques minutes, sa robe semblait avoir été raccommodée. Cela étonna Evart. Quand bien même il était mage et semblait intéressé par le pouvoir derrière son masque de mutisme, le prêtre de Tyr avait acquis la certitude qu'il faisait attention à son apparence, au moins vestimentaire. Il est vrai que les vêtements ont toujours exprimé un rang social et une puissance, la recherche de puissance et d'influence passait bien souvent par un affirmation du rang social par les vêtements. Se basant sur ses suppositions, il aurait plutôt supposé qu'il se serait acheté de nouveaux vêtements.

Quoiqu'il en soit, les magistrats revinrent ici et Evart repartir jusqu'à Brock. Le marchand reprit la parole et annonça des nouvelles importantes : premièrement, il supposait avoir le temps de recruter des troupes et de demander de l'aide aux elfes, ce qui paraissait raisonnable, secondement, Brock était acquitté. En outre Yeliandre demanda à Raistlin et Evart de le rejoindre plus tard à son bureau au premier étage. Quoiqu'il en soit, l'audience fut définitivement levée et deux des magistrats partirent comme une partie de l'audience. Il restait cependant Naya et Glaemar qui discutaient tranquillement. Il fit un petit signe à Raistlin pour s'approcher et celui-ci vint se placer à coté de lui, le jeune homme lui répéta rapidement ce que Yeliandre lui avait dit. Enfin il s'approcha donc à une distance suffisante pour leur laisser toute la discrétion nécessaire, au bout de quelques minutes, Glaemer finit sa conversation et se tourna vers Evart en disant :

- A plus tard, nous allons certainement être amené à nous revoir sous peu.

- Ce sera un honneur.

Alors il s'éclipsa et le cormyrien s'approcha de la magicienne. Et dit :

- Je vous prie d'excuser mon ignorance sur l'histoire de votre peuple. Néanmoins, j'aimerai votre avis sur un objet. Peut-être pourriez-vous m'accorder audience dans un cadre moins solennel qu'ici ? Je pense que mon compagnon Raistlin Majère, qui est également mage, pourrait nous aider. dit-il en présentant Raistlin selon les règles

Messages : 846

Le magistrat Glaemar quitta ainsi la grande salle, tout sourire, et on ne le revit plus. La salle était à présent vidée de tous ses occupants, les derniers villageois sortaient à l'instant. Le cormyrien avait sollicité une audience privée avec la magistrate mais l'endroit n'était pas vraiment propice à cela. Elle paraissait plus amicale que durant le procès ; peut être avait-elle apprécié qu'Evart s'excuse sur son ignorance. Néanmoins, ce n'était pas ce qui l'incita à accepter sa proposition. La convoitise des magiciens pour les objets mystérieux était la même qu'à Faerûn et avec le peu d'informations que le Cormyrien lui confia faisait que le mystère restait entier. Elle désirait réellement en savoir plus, à la fois sur l'objet et sur les aventuriers eux-mêmes. Elle répondit alors :
- Nous serons plus à l'aise dans mes quartiers pour discuter. C'est à l'étage, vous n'aurez pas besoin de chercher loin pour votre rendez-vous avec Yeliandre. Elle s'adressa ensuite à Raistlin qu'elle dévisagea maladroitement. C'est un plaisir de vous rencontrer, nous n'avons pas eu le temps de faire connaissance tout à l'heure.
Etant en contact direct, les deux magiciens pouvaient s'identifier mutuellement, sentir les courants magiques qui circulaient entre eux. Elle n'ajouta rien de plus et fit signe aux aventuriers de la suivre.

Ils repassèrent donc dans le couloir qu'ils avaient emprunté pour venir ici, où était toujours disposée la table où avait été servi le thé de l'après-midi aux magistrats. Ils prirent ensuite l'escalier qu'ils avaient aperçu en arrivant et montèrent à l'étage. Il faisait relativement frais dans les couloirs du haut, toutes les fenêtres étaient ouvertes mais des rideaux empêchaient à la lumière du soleil de trop pénétrer à l'intérieur. Le manoir semblait vraiment immense vu de l'intérieur ; c'était presque un labyrinthe de couloirs et de portes mais Naya se dirigeait machinalement vers ses quartiers. Ils passèrent juste devant le bureau de Yeliandre dont la porte était ouverte. L'homme fit un signe aux aventuriers mais Naya lui expliqua qu'ils avaient aussi un entretien avec elle, et qu'ils ne seraient pas long.

Naya ouvrit une porte qui donnait sur une pièce plutôt grande, bien éclairée en raison de sa position face au soleil. Il y faisait plus chaud avec les fenêtres ouvertes il y avait un courant d'air rafraîchissant de temps en temps. Dans la pièce se trouvait tout ce dont pouvait avoir besoin un individu pour vivre : une table avec des ustensiles de cuisine, un lit, une armoire et d'autres meubles divers. Le mobilier ne payait pas du luxe mais Naya expliqua qu'elle vivait à l'étage et qu'il s'agissait en fait des quartiers de son apprenti qui était absent pour le moment, une mission lui avait probablement été confiée. Au milieu de la pièce se trouvait un escalier qu'ils empruntèrent.

Ils arrivèrent dans une petite pièce ouverte, vraiment minuscule, qui donnait sur la grande. Une petite fenêtre obstruée permettait d'y voir clair et deux sièges confortables s'y trouvaient, au milieu d'un foutoir digne d'un magicien réputé. Des livres traînaient un peu partout, des ingrédients alchimiques et divers objets de magicien décoraient la pièce. Une petite porte se trouvait sur la gauche et devait donner sur les véritables quartiers du mage mais les aventuriers n'allèrent pas plus loin. Il n'y avait que deux fauteuils dans la loge et Naya fit léviter un tabouret qui se trouvait dans la pièce du dessous. Elle invita d'abord Raistlin, et non Evart, à s'asseoir dans un fauteuil puis proposa au Cormyrien de prendre le tabouret. Naya s'installa ensuite dans son propre fauteuil aux coussins de couleur bleus. C'est alors que les aventuriers purent admirer le visage de leur interlocuteur ; elle retira son capuchon pour dévoiler des cheveux roux mi-long. Elle avait fait deux petites couettes avec les cheveux de derrière qui ne se voyaient pas trop. Une fois que tout le monde fut installé, elle demanda des explications au sujet de cet objet.

Spoiler:

Les appartements de Naya étaient vraiment peu rangés. A croire que l'étude de la magie l'absorbait bien trop pour tenir propre son habitat. Mais Evart n'était pas là pour la juger sur ça car il n'était pas magicien. Quoiqu'il en soit, ils arrivèrent dans un petit bureau avec deux fauteuils et un tabouret. La magicienne invita Raistlin à s'asseoir dans le fauteuil tandis qu'elle proposait à Evart de prendre le tabouret. C'était encore un attaque à l'honneur du jeune noble et c'était proprement inadmissible. L'étiquette voulait qu'un noble, surtout de rang ducal, avait préséance face à un mage, aussi puissant soit-il et à part s'il avait quelque rang dans l'administration de l'état, ce qui n'était pas le cas. Dès lors, Evart refusa poliment :

- Je ne vais pas rester longtemps, je ne saurais donc m'asseoir. Pour tout vous dire, nous avons trouvé un crâne étrange entouré d'un aura maudite, à tel point qu'il y avait plusieurs centaines d'araignées qui habitaient le petit boyau où on a trouvé le crâne. Celui-ci était d'ailleurs posé sur un petit promontoire et illuminé par une bougie à l'intérieur. C'était littéralement malsain et morbide. Je n'en sais personnellement guère d'avantage mais il me paraît magique et mauvais. En tant que magistrat, et magicienne, rajouta-t-il avec une pointe de mépris à son égard, il me semblait normal que vous soyez au courant et que vous fassiez quelque chose pour le détruire si nos craintes sont fondés. Je pense que Raistlin sera plus à même de vous en parler que moi. Si vous me le permettez, je vais donc me retirer.

Sans attendre la moins réponse de la dame, le jeune homme se retourna et marqua une pause d'une fraction de seconde avant de reprendre sa marche. En Féérune, tourner le dos de la sorte a quelqu'un était clairement une insulte et Evart n'avait nul honte à l'utiliser face à quelqu'un qui ne respectait pas les codes sociaux et qui ne méritait pas son respect. Il traversa donc les appartements de la magicienne. Une fois à l'extérieur, il croisa un serviteur qu'il arrêta en demandant :

- Bonjour, je suis désolé de vous déranger dans vos tâches mais pourriez-vous m'indiquer les appartements ou le bureau du conseiller Yeliandre ?

- Bien sûr, il est juste là. Dit-il en le montrant du doigt.

- Je vous en remercie. Répondit Evart en s'inclinant légèrement.

Spoiler:

Il traversa le couloir avant de frapper à la porte. Il entendit un « entrez » et ouvrit la porte pour découvrir le bureau de Yeliandre. Celui-ci n'était pas bien grand et surtout dépourvu de fenêtres, cela devait être un avantage comme un problème au vue des chaleurs affectant l'archipel. Le mobilier, par contre, exprimait clairement le rang social du magistrat avec un mobilier de qualité, des tapisseries et des peintures, de nombreux livres et même un coffre sur une commode derrière le bureau. Alors Evart dit poliment

- A nouveau bonjour, mon compagnon vous prie de l'excuser mais il discute de Naya d'un objet potentiellement magique que nous avons vu dans la grotte. Je pense que l'attendre pour parler de la menace représentée par l'alliance de Rhadjiara serait préférable.

Hormis le temps dévolu aux délibérations, durant lesquelles Evart l’avait rejoint, Raistlin n’eut pas souffrir d’une trop longue attente. D’après ce qu’il venait de voir la justice à Zi’Hafa devait être assez expéditive… et dans ce cas précis, il ne s’en plaignait pas. Alors qu’ils entraient dans ce qui devait être les appartements de la jeune femme, le mage fut étonné de l’aspect de la pièce. Celle-ci correspondait plus à une chambre de novice qu’à celle d’une magicienne confirmée, occupant de surcroit la fonction de magistrat. Comme si elle avait perçu son étonnement, Naya expliqua qu’ils s’agissaient là des appartements de son apprenti. Lorsqu’il fallut s’asseoir, la magicienne manqua cruellement de savoir-vivre, invitant le mage, et non le noble, à occuper le second siège. Raistlin s’assit en savourant toute l’ironie de la situation et attendit la réaction de son compagnon qui ne se fit pas attendre. Evart déclina l’offre, avant de dire à Naya ce qu’il pensait du crâne et de s’en aller la mine sévère. La magicienne ne comprendrait certainement jamais combien son comportement était déplacé. Cela laissa Raistlin perplexe sur son ascension au rang de magistrat. Tout mage aussi arrogant et méprisant soit-il, devrait savoir user de la bienséance. Raistlin lui-même se devait de respecter le protocole, non par faiblesse, mais simplement à dessein. Le jeune homme détailla la magicienne et un sourire sardonique ourla ses lèvres noires. Pensive, Naya devait réfléchir à ce que lui avait dit Evart, alors Raistlin dit :

- Je pense aussi que ce crâne pourrait être magique, une aura semble en émaner. Comme l’a dit mon compagnon, elle est assurément malsaine et certainement maléfique je peux en attester. Malheureusement je n’ai pas pu lancer de détection de la magie pour confirmer mes dires, l’endroit n’était pas sûr et nous devions progresser dans la grotte. Il semble que nous devions y retourner pour déterminer la nature réelle de cet objet. Qu’en pensez-vous ?

Avant que Naya ne puisse répondre, le jeune mage continua d’un ton doux :

- Y aurait-il une guilde de mage ou une quelconque académie dans cet archipel ? Pourrais-je savoir où vous avez été formée, ou serait-ce déplacé de ma part ? ajouta-t-il feignant l’hésitation. Il se pourrait que je doive demeurer plusieurs mois ici, il me serait certainement plus agréable d’avoir la compagnie de nos semblables.

Le jeune mage n’en pensait pas un seul mot, mais il ne laisserait pas passer une opportunité d’augmenter sa connaissance des arcanes…

Messages : 846

Comme l'on pouvait s'y attendre, Evart n'avait guère apprécié l'attitude de la magistrate envers lui. Elle n'aimait pas particulièrement les nobles et dans le passé elle avait dû subir la justice de son propre peuple, mais cela Evart n'avait aucun moyen de le savoir. Il prit donc congé des deux mages après avoir expliqué pourquoi il avait solicité une audience auprès d'elle. Il s'agissait en vérité d'un crâne potentiellement dangereux. Tout d'abord Naya fut étonnée que le cormyrien, serviteur de Tyr dieu de la justice à Faerûn, laisse son compagnon seul avec elle. D'après ce qu'elle avait pu découvrir à son sujet, il ne paraissait pas particulièrement altruiste. Un magicien ne se donnerait pas la peine de détruire une relique, à supposé que cela en soit une, alors qu'il pourrait s'en emparer et s'en servir à sa guise. Le geste du cormyrien n'était donc pas pour lui déplaire. Raistlin prit la parole en premier et ne laissa pas parler la magistrate avant d'avoir fini. Celle-ci répondit ensuite :

- Malheureusement il n'y a aucune guilde ici à Zi'Hafa. Je suis l'une des rares pratiquantes ici, avec Alkar le Sage. J'ai été formée à Tal'Tressir, c'est là que le savoir est le plus abondant. Il y a plusieurs raisons qui font que notre ville n'accueille pas d'apprentis, et cela prendrait trop de temps de vous les énoncer. Je pourrais vous emmener là-bas, mais d'abord parlons du crâne voulez-vous ? Cet objet que vous mentionnez est intriguant, en effet. Je ne pense pas qu'un tel crâne ait pu être disposé ainsi pour la décoration, et l'aura que vous avez ressentie le confirme. Votre ami a parlé d'araignées, vous pouvez me les décrire ? Raistlin lui expliqua alors qu'il ne s'agissait que d'araignées communes, très petites mais nombreuses. Leur taille importe peu, c'est le fait qu'elles se soient rassemblées près du crâne qui est important. Voici une preuve de plus concernant la nature de cet objet. Vous avez raison, il faut aller voir ça de plus près !
Le ton enjoué qu'elle prit témoignait de sa convoitise pour l'objet, tout comme celui de Raistlin.
- La grotte que vous avez explorée nous est inconnue et ceux qui y sont allés avant vous n'ont pas laissé beaucoup d'écrits. Vous allez devoir jouer les guides. Pour être franche avec vous, je ne pense pas que mes collègues accepteront une expédition préliminaire, surtout si c'est de vous et moi qu'il s'agit, sans vouloir porter atteinte à votre condition. J'essayerais d'arranger cela au plus vite ; dîtes-moi juste quand vous serez libre pour y aller.
Elle attendit la réponse de Raistlin ; elle ne voulait retenir son interlocuteur trop longtemps car elle savait qu'il avait lui aussi rendez-vous avec Yeliandre.

Le mage écoutait attentivement son interlocutrice. Elle semblait partager ses convictions et expliqua à Raistlin qu’une simple expédition en duo ne remporterait certainement pas l’approbation de ses pairs. Loin de vouloir y aller seul, le jeune homme comptait bien sur l’appui de la garde de Zi’hafa, tant qu’ils ne le gênaient pas cependant. Raistlin voulait ce crâne, mais une troupe de soldats brutaux et indisciplinés était la dernière chose qu’il désirerait voir dans cette grotte. Aussi était-il impératif qu’Evart et les gardes les accompagnent, mais c’est seuls que les deux mages devraient régler la question du crâne. Après que Naya eu fini le sorcier lui dit doucement :

- Certes, nous ne pouvons décemment pas y aller seuls. Evart et la garde seraient les bienvenus pour assurer notre sécurité, ne pensez-vous pas ? – il la dévisagea de ses yeux dorés puis reprit. Toujours est-il que nous pourrons partir des que vous aurez terminé les préparatifs, je n'ai pas d'obligations particulières si ce n'est le rendez-vous avec Yeliandre. Aussi si nous en avons terminé, je vais prendre congé, mon partenaire m'attend.

Attendant une réponse de Naya, Raistlin s’apprêtait toutefois à se lever.

Messages : 846

Naya se leva la première pour inviter son hôte à faire de même. Ainsi la discussion était close. La magicienne expliqua à Raistlin qu'elle viendrait le chercher après que son rendez-vous avec Yeliandre soit terminé, et même un peu plus tard car elle avait elle-même des choses à faire auparavant. Elle le salua avec un sourire et le laissa s'en aller. Il redescendit donc l'escalier de bois et quitta les appartements avant de se diriger vers le bureau de Yeliandre qui n'était pas bien loin.

Pendant ce temps Evart et le magistrat avait entamé une discussion sur la justice de Zi'Hafa et celle de Tal'Tressir. Le cormyrien était en effet très curieux de connaître les points que ces deux villes avaient en commun. Hélas ils n'eurent pas le temps de parler beaucoup que Raistlin pointa le bout de son nez au travers de la porte entr'ouverte. Yeliandre l'invita à entrer, et à s'asseoir, car il avait fait quérir une seconde chaise contrairement à la magicienne. Le serviteur qui l'avait apportée avait aussi amené une bouteille d'un vin local qui ne portait aucune étiquette. Laissant Raistlin s'installer à son aise, le magistrat fouilla dans un des tiroirs de son bureau et en sortit trois chopes en céramique.
- Puis-je vous proposer un rafraîchissement ? Il s'agit du vin que nous produisons ici à Zi'hafa. Nos vignes sont un peu à l'écart du village et les récoltes ne sont pas abondantes, mais nous pouvons nous vanter de sa qualité.
Evart répondit que ce serait un honneur tandis que Raistlin se contenta d'un hochement de tête ; par cette chaleur mieux valait accepter toute boisson même s'il s'agit d'alcool. Le magistrat versa à moitié les trois chopes et les tendit à ses invités. Concernant la qualité du breuvage, c'était un très bon vin comme l'avait affirmé Yeliandre mais c'était tout de même du vin, comme on en trouvait couramment sur le continent.

Une fois que tout le monde eut pris une gorgée de vin, la discussion pouvait commencer.
- Bien, comme vous vous en doutez peut être, je vous ai convoqués afin que vous nous aidiez à régler ce problème auquel nous sommes confrontés. Les informations que vous nous avez données vont nous être utiles, mais j'ai bien peur que nous ayons besoin de plus d'aide. Un messager est donc parti pour Tal'Tressir, mais pour être franc je doute que les Elfes prennent cette menace au sérieux. Vous ne le savez peut être pas, mais nos relations commencent à faiblir. Pour eux, il s'agira d'une crise supplémentaire qu'ils ajouteront à la liste de nos nombreux échecs. Je souhaiterais tant que nous ne soyons plus dépendants des Elfes pour gérer nos affaires, mais la situation est compliquée ici.

Assez parlé de tout cela, je doute que cela vous intéresse à l'heure actuelle. Bien ; ce que je vous demande est simple : nous avons découvert un réseau de galleries sur l'une des îles de l'archipel et nous y avons établi un campement. Pour le moment nous n'avons pas encore exploré la zone. Je voudrais que vous embarquiez à bord d'un navire et que vous vous rendiez là-bas. Votre expérience nous sera utile. Nous disposons d'un nombre d'hommes suffisant pour repousser toute attaque imprévue. Cela ne devrait pas trop poser de problème. Acceptez-vous de nous aider ? Il va de soi que vous serez généreusement récompensés pour vos services.
L'offre avait été faite et cela représentait tout de même beaucoup. Yeliandre accorda un petit délai aux aventuriers pour réfléchir à cette proposition.

Une fois qu'il eut fermé la porte, le cormyrien fut frappé par la fraicheur des lieux. En effet, n'ayant pas de fenêtres, le petit bureau ne pouvait recevoir les intenses rayons de Soleil qui brulaient l'archipel. Par contre, il devait exister une ingénieuse astuce pour permettre une bonne aération de la pièce. Quoiqu'il en soit, Yeliandre invita le jeune à s'asseoir et le noble cormyrien accepta sans peine cette invitation.

Avec une palabre tout à fait commerçante, le magistrat entama la conversation sur le résultat du tribunal qui dévia vite sur la Justice dans l'archipel. En tant que prêtre de Tyr, Evart était excessivement intéressé par ses questions et écouta avec attention les différents systèmes juridiques de Tal'Tressir et Zi'Hafa dont il put discuter à l'aune de la justice cormyrienne et de celle pronée par Tyr.

Cependant ils ne purent continuer cette passionnante discussion à cause de l'arrivée inopinée de Raistlin qui en avait fini avec Naya. Le magistrat invita l'étrange mage à s'asseoir avant de se lever pour se diriger vers la petite étagère derrière lui avant de proposer un vin rouge local dont il vantait la qualité. Poliment, le jeune noble lui répondit :

- Ce serait pour moi un honneur.

D'un hochement de tête, Raistlin opina et Yeliandre versa du vin dans chacun des verres qu'il posa sur la table. Le cormyrien prit la coupe en étain et étudia un peu le breuvage qui avait une belle robe et un nez plus que correct. Il se permit donc de le goûter. S'il n'avait pas la bouche des meilleurs crus du Cormyr et même de Padraig, il restait tout à fait correct et largement supérieur à n'importe quel vin standard du continent. En effet, il était plus léger et moins concentré en alcool mais il avait un goût très fruité.

Rompant son analyse, Yeliandre continua en leur demandant de les aider à en savoir plus sur la menace représenté par l'hétéroclite alliance. Cependant, il insista sur le fait que les elfes ne la prendraient certainement pas au sérieux. Cela n'était pas étonnant aux yeux du jeune noble, lorsqu'on avait passé trop de temps sans voir l'ombre d'une menace, on avait tendance à baisser sa garde et à s'installer dans la vie politique calme et sereine des villes bourgeoises du continent. Zi'Hafa semblait avoir une situation plus tumultueuse, moins grande et moins protégée, elle avait certainement eu affaire à plus de pirates et de risques. Cela avait dû maintenir un esprit guerrier bien plus fort.

Quoiqu'il en soit, le magistrat leur proposa de rejoindre un campement humain basé dans une des îles de l'archipel et d'un vaste réseau de galeries qui pouvaient être utilisées par les pirates et hommes-lézards. Il leur proposa alors une forte rémunération pour leur aide. Même sans cette compensation financière, Evart aurait accepté car sa mère aurait préféré le voir aider le plus grand nombre que rentrer pour sauver une seule personne. Le jeune cormyrien pensait de la même façon, il devait faire passer le bien d'un plus grand nombre avant son bien personnel. Donc, il répondit rapidement :

- Je ne vois rien qui s'oppose à cela. Vous aider serait un plaisir et une nécessité imposée par la justice.

Naya montra l’empressement auquel Raistlin s’attendait. Elle voulait résoudre la question de ce crâne au plus vite. Le jeune mage n’en demandait pas moins. Avide de s’en emparer, Raistlin analysa les différentes possibilités qui s’offraient à lui alors qu’il marchait dans les couloirs du manoir. La solution la moins risquée restait de tenter une approche auprès l’apprenti de Naya... Lorsqu’il aperçut finalement la porte entr’ouverte du bureau de Yéliandre, Raistlin mit fin à ses réflexions. Il entra, après y avoir été invité, s’assit et accepta le vin que leur proposa le magistrat. Cependant le jeune homme n’en but que modérément, sa constitution ne lui permettant pas ce genre d’écarts.

Alors, Yéliandre leur expliqua ce qu’il attendait d’eux. Comme à son habitude, Evart exprima avec empressement son désir de servir la justice, non sans une certaine ferveur bigote. Raistlin lui en avait cure de justice, il se devait cependant d’accéder à la demande du magistrat s’il voulait quitter cet archipel le plus facilement possible. De plus l’exploration d’un autre réseau de galerie pouvait se révéler potentiellement intéressante d’un point de vue bassement matériel. Après qu’Evart eût fini Raistlin dit simplement :

- Je suis d’accord, cependant je voudrais savoir quand nous devrions partir…

Sa voix mourut et il fut soudain secoué par une irrépressible toux. Lorsque la douleur s’estompa et après avoir nettoyé son propre sang, il ajouta, la voix rauque :

- J’ai une affaire à régler avec votre collègue mage…

Messages : 846

La réponse d'Evart n'avait pas étonné le magistrat. Il s'était attendu à ce qu'il accepte toute proposition dont le but serait d'aider la population de la cité. Le magicien aussi était d'accord mais il expliqua qu'il avait une affaire à régler avec Naya, et ceci l'intriguait par ailleurs. Il souhaitait obtenir des renseignements au sujet de cette affaire mais une quinte de toux s'empara de Raistlin et seul le son de sa voix emplit la pièce. Quelques instants plus tard, lorsque la toux se fut estompée, Yeliandre proposa au magicien :
- Souhaitez-vous obtenir un rendez-vous avec un guérisseur ? J'en connais qui sont très doués dans leur domaine. Je peux envoyer chercher quelqu'un au temple de Waukyne sur le champ.
La solicitude du magistrat était généreuse, mais il était peu probable que Raistlin accepte.
- En ce qui concerne votre voyage, un navire sera à votre disposition demain matin. Vous pourrez partir quand vous le voudrez. D'ailleurs, il se fait tard et c'est bientôt l'heure du dîner. Accepteriez-vous de vous joindre à nous dans la grande salle ?

Yéliandre semblait donc s’inquiéter de l’état du jeune mage… Cela aurait pu toucher l’intéressé, néanmoins cela ne fit que lui remémorer combien lui coutait cette infirmité qui ne guérirait certainement jamais. Son maitre l’avait ainsi récompensé de son ambition et sa soif de connaissances. A l’évidence ce vieux fou n’avait pas eu l’étoffe nécessaire pour se plonger au plus profond des arcanes et de ses secrets. Borné, Elren s’était imposé des limites dictées par une société dans laquelle un magicien « ouvert » à toutes les formes de magies était frappé d’opprobre. Cette vision manichéenne des choses était malheureusement bien trop répandue selon le jeune mage qui avait su, lui, éviter cet écueil. La seule et unique chose qui apaisait son ressentiment était la certitude que son maitre et ses anciens camarades avaient payé leur sectarisme…

Brusquement happé des méandres obscurs de son esprit, Raistlin reprit contenance et dit d’une voix sombre :

- Merci, toutefois le mal qui m’affecte ne saurait être guéri, il est mon fardeau…

Il marqua une courte pause, étudiant la perspective de se faire soigner par des prêtres de Waukyne. Finalement il reprit :

- Pour ce qui est de votre demande, je pense que nous ne partirons pas dès demain. Je suis exténué et je pense que Ser Evart l’est tout autant. Personnellement je doute de pouvoir supporter une autre expédition de la sorte sans un peu de repos…

En outre ce délai lui laisserait certainement le temps de décider ce qu’il ferait concernant le crâne et Naya.

Après qu'il se soit enquit de la date à laquelle ils pourraient partir, la voix du mage se perdit dans une lourde quinte de toux. Au fur et à mesure que sa toux était moins forte, Raistlin approchait un mouchoir près de sa gorge. Il n'était pas totalement mais parsemé de nombreuses auréoles rouges, signe de ses quintes de toux précédentes. Lorsqu'il approcha ledit linge blanc de sa bouche, Evart détourna le regard car il avait encore un peu de pudeur face aux personnes malades.

Dans un élan de générosité, Yeliandre proposa au mage d'appeler le guérisseur pour le soigner. Raistlin déclina poliment arguant qu'aucune médecine ne pouvait l'aider. A ses maux, la curiosité du jeune noble fut titillé. Certes certains maux ne pouvaient être guéri mais être certain qu'aucune médecin ne pouvait rien, cela dénotait quelque chose de plus intriguant qu'une « simple » maladie.

Sur cela, il continua en demandant un peu de temps pour se reposer. Quand bien même il était capable de partir dès demain, Evart comprenait les raisons du mage qui était de constitution plus fragile et n'aurait certainement pas refusé un jour de repos qu'il n'avait pas eu depuis le départ de Padraig. Il n'y avait rien d'urgent à partir pour ce campement. En outre, cela lui permettrait sûrement d'en apprendre plus sur Zi'Hafa. Il continua :

- Je comprends votre besoin de vous reposer et je le partage en effet.

Il se retourna ensuite vers Yeliandre et dit :

- Concernant votre proposition, elle est généreuse. Malheureusement nous avons déjà été invité par la famille de Brock donc nous sommes contraints de décliner votre invitation mais ce serait un vrai plaisir de remettre cette invitation à plus tard.

Messages : 846

Le magistrat essuya deux refus à la suite mais dans les deux cas il n'en fit rien. Il comprenait ce que les aventuriers ressentaient après une journée aussi épuisante et un peu de repos était toujours le bienvenu. Yeliandre allait conclure ce rendez-vous mais avant qu'il ne dise mot il reprit les chopes de vins et les reposa sur le plateau afin que le domestique vienne les reprendre. Il se leva ensuite et dit :
- Bien, je pense que nous n'avons plus rien à nous dire, j'ai quelques préparatifs à faire avant le dîner et je voudrais profiter du soleil avant qu'il ne se couche. Ah au fait, il me faut savoir où vous logerez cette nuit si je dois envoyer vous chercher demain matin, à moins que vous préfériez venir ici ? Quoiqu'il en soit nous nous verrons demain !
Il laissa ses invités se lever et quitter la pièce avant de sortir lui-même en fermant la porte. Puis il ajouta poliment, toujours avec le même empressement :
- Et bien messieurs, je vous dis à demain, et bon appétit ! Avez-vous besoin qu'on vous guide, ici ou dans la cité ? Je peux vous faire accompagner si vous le désirez.

Après avoir subi deux refus, le marchand-magistrat semblait très désappointé. Même s'il comprenait son agacement, Evart ne pouvait faire autrement. Raistlin était exténué et cela se voyait. Ensuite l'invitation de la famille de Brock avait déjà été acceptée alors il était de son devoir d'y aller. On ne changeait pas de parole sous prétexte qu'une proposition était plus intéressante … Quoiqu'il en soit Evart s'efforça à être le plus poli possible :

- Nous avons été invité pour un repas par la mère de Brock, nous serons donc chez elle le temps du repas puis nous rejoindrons l'auberge située juste devant la muraille nord. Ensuite vous n'aurez pas à vous donner le quelconque mal puisque nous vous rejoindrons demain matin et même là, nous devrions pouvoir arriver à trouver notre chemin mais je vous remercie de votre généreuse proposition.

Le magistrat s'esquiva et les deux aventuriers partirent à travers les couloirs du Manoir. Evart était excessivement surpris par l'organisation des lieux qui étaient très fonctionnels et frais. Le climat local les avait certainement forcés à améliorer l'architecture. Combinée au talent des elfes, cela donnait un métissage intéressant et la qualité des bâtiments semblaient supérieurs à ceux de Féérune et du Cormyr. Enfin ils arrivèrent à la grande porte du Manoir …

La fatigue transparaissait dans la gestuelle et l’attitude réservée du jeune mage, celui-ci n’avait aucune envie de répondre à Yéliandre. Evart sembla le comprendre après qu’un blanc se fut instauré entre les trois interlocuteurs. Yéliandre venait de voir ses deux propositions refusées, aussi après un bref regard à Raistlin, le jeune noble s’empressa d’en expliquer les raisons. Raistlin s’en contenta, il n’avait rien à ajouter ne voulait qu’une seule chose : pouvoir se restaurer en toute quiétude. Le jeune mage sentait même capable de supporter une invitation venant la famille de Brock, un repas est un repas se dit-il.

Evart salua Yéliandre, Raistlin lui s’inclina simplement et le magistrat s’en fut. Alors les deux aventuriers s’enfoncèrent dans les couloirs du manoir. Evart détaillait l’architecture de la bâtisse, le jeune mage lui, profitait de ces rares moments où son esprit n’était pas en ébullition. Après avoir passé la porte du manoir Raistlin nota que son équipier semblait pensif. Intrigué, le jeune mage s’arrêta et rompit le silence :

- [Chondathan] Vous semblez bien pensif Ser Evart…

Le noble se retourna et Raistlin attendit une réponse.

Messages : 846

A la sortie du manoir, un petit vent frais vint rafraîchir l'atmosphère. Giselaine, la servante que les aventuriers avaient rencontrée en arrivant, leur demanda de laisser la porte ouverte pour le courant d'air. Il ne faisait pas encore nuit mais le soleil commençait à décliner dans le ciel. Il n'allait pas se coucher de sitôt mais l'heure du dîner approchait et ils allaient maintenant se diriger vers la demeure de Brock.

Raistlin venait d'engager la conversation avec son camarade mais celui-ci ne put répondre car ils furent interrompu par quelqu'un qui les attendait à la grille du manoir. Ils reconnurent immédiatement de qui il s'agissait : un homme au visage sans rides et à la barde argentée qui se nommait Shedin. Cette fois il portait une robe bleue plus appropriée pour le voyage. De plus, Evart l'avait aperçu lors du procès et il aurait aimé discuter avec lui. C'est maintenant chose faite et il n'aurait pas à le trouver dans la ville.
- Mes amis, je suis content de vous voir ! J'espère que ma présence ici ne vous pose aucun problème. J'ai attendu la fin de l'audience avant de venir vous voir. Comment allez-vous ?
Cette question banale était sans aucun doute un stratagème de sa part afin d'éviter les sujets concernant la raison de sa présence à Zi'Hafa.

Spoiler:

Lorsqu'ils arrivèrent dans le hall d'entrée, Evart et son compagnon rencontrèrent à nouveau la servante nommée Giselaine qui leur demanda poliment de bien vouloir laisser la porte du Manoir ouverte. Poussant le lourd pan de bois, le comyrien sortit en premier suivit de Raistlin qui rompit le silence en lui demandant ce qu'il lui occupait l'esprit. Le jeune noble dit alors :

- Oh, rien qui …

C'est alors qu'il fut interrompu par le magicien Shedin qui surgit comme un diable au détour d'un bosquet. Evart remarqua à nouveau son visage juvénile malgré une épaisse barbe et chevelure blanches. Soit il était né différemment et avait naturellement des cheveux blancs. Soit il n'était pas tout à fait humain, après tout, il était ami avec un Coualt … Quoiqu'il en soit il commença à discuter et le jeune noble lui répondit poliment :

- Certes non, vous ne nous dérangez absolument pas. Au contraire, c'est un plaisir de voir un visage un peu plus familier que celui de la majorité des habitants. Sinon nous portons plus ou moins bien, notre expédition nous a un peu éreintée mais rien de préoccupant. Et vous même ? Que faites-vous à Zi'Hafa ? Je vous croyais occupé en votre échoppe de Tal'Tressir ? Surtout avec Manwë qui était souffrant … A moins qu'il ne se soit remis sur pieds ?

Messages : 846

- Je suis ici en visite, répondit Shedin sur un ton tout à fait naturel. Une de mes amies avait besoin de mon aide, et lorsque j'étais sur le point de retourner à Tal'Tressir, un messager est arrivé afin d'annoncer l'ouverture du manoir pour une affaire judiciaire. Je n'ai pas beaucoup de liens avec cette ville mais je m'intéresse aux évènements qui s'y déroulent. J'avoue que je ne m'attendais pas à vous voir là !
Le magicien ne s'étala pas davantage, même s'il n'avait pas l'air pressé. Il proposa aux aventuriers d'aller s'asseoir autour d'une table à l'auberge afin de discuter plus longuement mais avant qu'Evart ne puisse répondre l'alchimiste le coupa :
- Peut être avez-vous rendez-vous quelque part ? Ce n'est pas grave. Nous pourrons nous voir demain si le temps me le permet. Je dois retourner voir Manwë. A ce propos, il va bien. Merci d'avoir posé la question. Il n'est pas entièrement remis mais sa guérison est sur la bonne voie.
Il conclut rapidement la conversation :
- Et bien je vais vous laisser. J'espère vous voir demain donc, je viendrai au manoir. Même si j'ai assisté à l'audience, j'aimerais que vous racontiez plus en détails ce que vous avez découvert dans la montagne.
Shedin salua les deux compagnons et se dirigea vers les portes principales en passant devant l'auberge. Raistlin n'en revenait pas, pas plus qu'Evart. Si le magicien aurait voulu placer un mot, il n'en aurait pas eu la possibilité. La conversation avait été expédiée d'un jet, même si on pouvait sentir que Shedin était content d'avoir revu les aventuriers. La raison de son empressement était un mystère, mais cela pouvait être un simple trait de caractère auquel il ne fallait prêter aucune attention...

Shedin était reparti aussi soudainement qu'il était arrivé. Le jeune mage était tout simplement sidéré. Le débit du vieil homme lui avait rappelé, l'espace d'un instant, la tirade incompréhensible dont Zarakai les avait assommés.

Shedin était fantasque, assurément, et Raistlin n'aimait pas du tout ça. Il tolérait les personnages hauts en couleurs. Après tout, le monde était ainsi fait : des excentriques pour amuser et des puissants pour régner. Mais qu'advenait-il, lorsqu'une personne combinait extravagance et puissance ? Car Shedin était puissant, à n'en pas douter, puissant et énigmatique...

Ses fréquentations pour le moins étranges tendaient à le confirmer. Un humain, tout mage soit-il, ami avec une créature telle qu'un Coualt ? Quelque chose dérangeait Raistlin. Son instinct, ainsi que son esprit tordu, lui intimaient de se méfier de cet 'homme'. Plus encore après qu'il eut affirmer vouloir tout savoir de leur expédition.

Raistlin décida, après une courte réflexion, de dévoiler ses suspicions à son coéquipier. D'après ce qu'il avait pu voir, Raistlin était quasiment certain qu'Evart respecterait son point de vue, et ce même s'il ne le partagerait pas. Toutefois le jeune mage décida minorer quelque peu ses propos, par sécurité.

Ainsi, alors que Shedin s'en était allé, Raistlin riva son regard doré dans celui de son interlocuteur et lui dit sans ambages :

- [Chondathan] Ser Evart, cet homme m'intrigue. Je crois que nous devrions faire montre d'une certaine réserve à son égard...

Alors qu'ils commençaient à peine à discuter, Shedin écourta un peu la conversation. En effet, ils ne purent avoir beaucoup d'informations sur ce qu'il faisait ici et purent avoir quelques informations sur l'état de santé de Manwë. Néanmoins il leur proposa aimablement de se diriger vers l'auberge pour partager le repas et la boisson mais Evart repoussa poliment l'offre car ils devaient toujours manger chez Brock … Décidément on pouvait dire qu'ils étaient disputés pour ce souper. Quoiqu'il en soit, la conversation fut expédiée et le magicien disparut aussi vite qu'il était apparu. Une fois qu'il eut été loin, son compagnon Raistlin lui dit dans leur langue natale :

- [Chondathan] Ser Evart, cet homme m'intrigue. Je crois que nous devrions faire montre d'une certaine réserve à son égard...

Evart ne pouvait nier que ce personnage haut en couleur l'étonnait et éveillait la méfiance. Comme beaucoup de nobles et personnes se destinant à diriger une région, il se méfiait de ces esprits libres et fantasques, donc imprévisibles

- [Chondathan] Certes, certes. Je ne veux pas néanmoins me montrer hostile à cet homme, aussi bien est-il un honnête homme. Je vous propose donc d'aller rejoindre la famille Lest pour le repas.

Le mage à la peau dorée hocha gravement la tête. Lui aussi « inquiétait » quelque peu le jeune homme. Sous ce masque placide et grâve ainsi que sous son tempérament réservé et secret, Evart décelait une ambition rare et présumait une absence de scrupules. Néanmoins il ne pouvait pas faire grand chose car il ne pouvait revenir à Féérune seul et ne pouvait rien intenter contre lui sans avoir des preuves d'un comportement répréhensible. Quoiqu'il en soit, il avait besoin de lui et était certain qu'il restait un puissant praticien. Soucieux de dissimuler ces soupçons, il s'efforçait d'être conciliant et, durant le trajet qui les amenait à la maison de la famille Lest, s'amusa :

- [Chondathan] Ne trouvez vous pas plaisant que nous soyons si demandé pour ce diner. Entre la famille Lest, les magistrats de Zi'Hafa et ce cher Shedin.

Rapidement les deux aventuriers atteignirent la maison de Brock et découvrirent celui-ci sur le palier le jeune Brock qui se tourna vers les deux hommes avec un large sourire. C'était compréhensible car il avait participé aux activités des pirates et c'était retrouvé entièrement blanchis. Ainsi Evart lui rendit son sourire et lui dit chaleureusement :

- Cher Brock … Je suis particulièrement heureux du déroulement de ce procès et que vous avez la chance de pouvoir reprendre une vie normale.

Messages : 846

- Moi aussi ! répondit-il. Cette nouvelle vie, je vous la dois Messire Evart. Puis il hésita. Et à vous aussi Raistlin. Même si le magicien s'était totalement détourné du procès, Brock se rappella qu'il avait participé à sa libération dans les grottes. Je vous en prie, entrez donc.

Lorsqu'ils pénétrèrent à nouveau dans la maison Lest, les aventuriers purent sentir une odeur de poisson dans l'air, bien que ce qui était en train de cuire dans la marmite n'en était pas. Si on approchait davantage du feu, on pouvait sentir qu'il s'agissait d'une loupe de légumes. Ils n'eurent pas le temps de mettre leurs papilles à l'ouvrage car la mère de Brock sortit de la pièce du fond, qui servait de cuisine, avec un plateau de poissons et sa garniture, une sorte de carotte mais à la texture d'une pomme de terre. Elle sourit en voyant les deux invités.
- Vous êtes arrivés ! Je vous en prie asseyez-vous, la soupe devrait être prête maintenant.
Elle posa son plateau et alla s'occuper du potage, la louche à la main. Jensen arriva peu après sa mère en souriant à son tour, timidement. Celle-ci apportait les boissons : un grand pichet d'eau fraîche et une bouteille de vin, probablement le même qu'on avait servi dans le bureau du magistrat. Elle servit tout d'abord de l'eau dans les gobelets.

Lorsque tout le monde fut attablé, madame Lest servit la soupe dans des bols.
- Servez-vous en pain ! Je les ai achetés aujourd'hui au marché et il y en a bien assez pour tout le monde.
Les pains en question avaient des formes très exotiques et certains étaient plus riches en céréales que d'autres. On pouvait constater que la table des Lest était bien garnie. De plus, la soupe comportait une grande variété de légumes et son goût très épicé ne ressemblait à aucune soupe qu'on avait l'habitude de boire à Faerûn.

Durant les premiers instants du repas, la conversation tournait beaucoup autour du procès qui avait eu lieu et les remerciements envers les invités furent bien nombreux. Ce n'est qu'ensuite que la discussion devint plus intéressante pour la famille Lest car la mère de Brock commençait à questionner les invités au sujet de leur pays d'origine. Elle était curieuse de savoir combien de royaumes s'étendaient par delà l'océan, si on trouvait d'autres races amicales et d'autres questions plus pertinentes, par exemple pourquoi les aventuriers s'entretenaient parfois dans une langue inconnue, et pourquoi comprenaient-ils tout de même la langue que parlaient les habitants de Zi'Hafa. A ceci ni Evart ni Raistlin ne pouvaient encore fournir une explication sensée mais les renseignements qu'ils apportèrent pour les autres questions suffirent à apaiser la curiosité de leur hôte.

Messages : 846

La discussion avait tourné court ; la mère de Brock était consciente qu'elle était en train de les assommer de questions et mais elle avait pu apaiser sa curiosité. Chacun terminait son repas à son rythme et les aventuriers étaient bien contents d'avoir pu souper dans une demeure telle que celle-ci, où la nourriture était vraiment bonne, et gratuite ! Evart, plein de bonnes manières et de politesse, remercia longuement la famille pour son accueil mais il finit par annoncer leur départ. La nuit allait tomber et il fallait maintenant qu'ils gagnent l'auberge afin qu'ils puissent se reposer, un autre voyage les attendait et même si le navire ne partirait pas demain, les voyageurs ne resteraient pas inactifs bien longtemps. Comme on pouvait s'y attendre, la mère de Brock s'interposa avant qu'ils ne puissent se lever et prendre congé.
- Puis-je également vous inviter à rester pour la nuit ? Je ne pourrai jamais vous remercier assez avec un simple repas! Vous pourrez vous reposer ici et prendre le petit déjeuner avec nous demain matin, puis vous partirez. Qu'en dîtes-vous ?